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La réponse du Dr Lehman à mon article sur le dépistage du cancer du sein Contre le dépistage du cancer du sein, mais Pour quoi? m’a donné envie de creuser le sujet de ce cancer.
Parce que mettre en parallèle la vaccination H1N1 et le dépistage du cancer du sein, comme il fait, comme d'autres le font, ça cloche forcément quelque part.
En aparté, je précise, que je travaille dans un très gros établissement de santé, ou plusieurs patients atteints de grippe H1N1 y avaient été hospitalisés, dont une jeune patiente décédée d’insuffisance respiratoire gravissime en quelques heures, et le frère de l’un des médecins, qui a gardé de graves séquelles d’un long séjour en réa ou il a frolé la mort. La grippe H1N1 a bel et bien existé, elle était bel et bien grave. La manière de gérer est autrement discutable. je me suis retrouvée réquisitionnée dans un gymnase pour vacciner à tour de bras dans cet emballement médiatico-politique ridicule.
Pour revenir à ce qui nous divise, à savoir l’intérêt du dépistage du cancer du sein,
- Le dépistage influe peu sur la mortalité.. Mais en fait, la mortalité du cancer du sein, tous stades confondus est actuellement une des meilleures en cancérologie.
On meurt moins de cette maladie : Survie relative à 1 an : 97 %, à 5 ans : 85 %
Et à 20 ans c’est encore 65% de survie.
Que les femmes passent par le dépistage organisé ou pas, qu'elles aient plus tard un cancer plus avancé, elles ont de bonnes chances de survie à 10 ans à partir d'une date considérée. Le problème c’est que ces 10 années risquent de ne pas être vécues de la même manière selon que l'on a eu un cancer dépisté plus ou moins tôt dans cet intervalle la.
- La question du surdiagnostic est un vrai questionnement que personne ne nie. Encore qu’un épidémiologiste de qualité écrivant sur ce sujet ne tire pas les conclusions hâtives des militants de l’arrêt du dépistage, mais énumère plus posément ces réflexions :
En conclusion, je tire trois leçons du dépistage du cancer du sein:
1) Comme il n'est pas prouvé que le dépistage diminue la mortalité et comme le surtraitement consécutif au dépistage est nuisible, il ne faut pas précipiter la biopsie. Il convient d'observer la dynamique de la tumeur avant de l'agresser.
2) L'histologie n'est pas une condition suffisante pour définir une maladie cancéreuse. Il faut étudier l'histoire naturelle du cancer
3) Pour évaluer la pertinence du dépistage, il faut identifier les experts internationaux indépendants de toute pratique du dépistage ou des soins consécutifs au diagnostic de cancer du sein. Et, aussi, informer des non-médecins pour constituer des jurys citoyens.
Par Bernard Junod, épidémiologiste et médecin de santé publique
- En fait, j’ai fini par mettre le doigt sur ce qui, selon mon avis, sépare le plus les pro-dépistages et les anti.
Ce sont les 10 années qui jalonnent la vie d’une patiente précocement (sur?)diagnostiquée sur un dépistage et la vie d’une patiente à laquelle à été diagnostiquée un cancer invasif quelques mois ou années plus tard.
Voici justement la vie de 3 copines :
Machine 51 ans, est une adepte de la découverte précoce des maladies. A la mammo de dépistage, , on lui découvre et biopsie une toute petit tumeur de moins de 1 cm sans ganglion. Elle se dit que grâce au dépistage, elle a de la chance. Elle sait que le traitement qu’on lui propose est surement trop lourd pour le petit cancer dont elle est atteinte, mais c’est un mauvais moment à passer pour guérir. Tumorectomie, radiothérapie, chimio « de sécurité », puis 5 ans de traitement hormonal, et un suivi clinique et radiologique. Son cœur bat chaque année, mais rien de nouveau ne survient.
Sa copine, Truc, a une vie tellement survoltée, qu’elle n’a pas de temps à consacrer à sa santé. En plus, le dépistage, franchement, avec toutes ces histoires de surtraitement, elle n’y tient pas. Elle vient d’avoir 51 ans, et un beau matin, sous la douche, elle palpe une boule dans son sein. Médecin, bilan, cancer de 14 mm, ganglions négatifs. Le traitement est le même que celui de son amie, lourd, tumorectomie, radiothérapie, chimio, puis elle part sur 5 ans de traitement hormonal, et un suivi clinique et radiologique. Seulement, 2 ans plus tard, nouvelle boule juste à côté de la première. Récidive locale. Cette fois on lui enlève le sein, et on lui fait une chimio à nouveau. 10 ans après son cancer initial, elle est toujours en vie, et d'ailleurs malgré la récidive elle avait 8 chance sur 10 d'être encore vivante. Seulement, elle aura eu 2 chimio, un sein en moins, des mois de vie fatigués, et une qualité de vie très altérée et une trouille durable durant la majorité de ces années.
Leur troisième amie, Bidule, se convainc qu’avec 2 copines atteintes d’un cancer du sein, statistiquement elle n’a aucun risque, étant donné qu’une femme sur 10 de leur âge sera touchée. L’été de ses 51 ans, elle se fait piquer par une guêpe. Le médecin lui détecte des ganglions sous l’aisselle, attribués à la piqure, mais comme ils ne disparaissent pas, on s’intéresse à son sein. Parce que le courrier de dépistage reçu presque le jour de ses 50 ans, elle l’a laissé dans un tiroir. Moins chanceuse, Bidule, son cancer est déjà gros, et les ganglions sont envahis. Dans 10 ans, elle sera probablement encore en vie, avec son cancer de 3 cm et 3 ganglions, elle a encore presque 7,5 chances sur 10 d’être vivante dans 10 ans. Mais les 10 années, ça va être : un sein en moins, les rayons, la chimio, l’hormonothérapie, la récidive ganglionnaire avec re-chimio, puis la récidive métastatique osseuse. De la chimiothérapie presque tout le temps, une vie de cancéreuse, de malade, un handicap permanent.
A 10 ans, les 3 femmes sont en vie. Néanmoins, je garde une conviction; si l’on ne propose pas de mammo systématique aux femmes, on va perdre du terrain sur le domaine des petits cancers précoces et curables … et probablement soignés trop fort. ce qui compte dans une vie ? Etre encore la 10 ans après, même malade d'un cancer, ou bien vivre ces 10 ans sans maladie, même si cela passe par le traitement d'un petit cancer dont personne n'est formel quand au risque évolutif si on ne l'avait pas dépisté.
Donc, en guise de conclusion, je pense que se baser sur la notion de survie à 10 ans pour estimer que le dépistage du cancer du sein n'a pas d'intérêt, ce n'est pas le bon indicateur. De même que l'angoisse liée au surdiagnostic et au surtraitement n'est pas non plus le bon indicateur. Ce qui est important, c'est de comparer ce qui se passe dans les 10 années considérées, pour toutes les femmes dépistées ou non. La qualité de vie des 2 groupes au cours de ces 10 années a t'elle été identique,?
Si le groupe dépisté a pu en pâtir en qualité de vie initiale du fait d'un traitement excessif, est ce affirmatif que le groupe non dépisté systématiquement n'en a pas pâti secondairement à cause d'un cancer plus invasif, plus grand, donc plus grave? Y a t'il des les études ? .