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Même pas cap de jouer au loto, j’ai néanmoins gagné un des premiers gros lots de mon département : la réquisition pour aller faire des vaccins contre la grippe dans un centre de vaccination !
Reçue la semaine dernière, le mercredi midi pour le vendredi après midi, il m’a fallu commencer par perdre 2 heures en téléphones administratifs pour expliquer qu’a l’heure exacte retenue pour me convoquer, 7 patients avaient rendez vous avec moi au bloc opératoire. Que ces patients avaient tous vu un anesthésiste, pris une journée, commencé pour certains la préparation intestinale de la coloscopie et qu’il était impossible que je les annule 24 heures avant. L’argument étant considéré comme recevable par nos DDASSiens et autres fonctionnaires municipaux, j’ai eu seulement le droit de changer de jour.
Et m’y voici collée aujourd’hui. Premiers moments de la vaccination des enfants, en plus. C’est plus qu’un gros lot, là , moi qui n’ai pas vu d’enfant en consultation depuis mes études datant de 3 siècles au moins.
Alors voila la journée de mascarade d’un médecin libéral, sorti de sa fonction contre son gré, pour aller remplir une soit disant mission de service public (alors que les médecins généralistes demandent à vacciner dans leurs cabinets et qu’on leur refuse)
On nous fait venir à 13 h pour commencer vers 13h45 après avoir pris connaissance de toutes les consignes. La vacation prévue est de 4 heures, mais je suis repartie seulement vers 18h
Sur la table vous trouverez tout un tas de documents avec les indications, les vaccins, les doses, plein d’informations disparates sur plein de papiers. En plus comme la nuit porte conseil à notre camarade Roselyne, voila qu’au petit matin d’hier elle nous a pondu un changement dans les vaccins des enfants. Depuis 24 heures on vaccine avec le vaccin adjuvé à partir de 24 mois et non plus de 9 ans. Ce qui a généré inquiétude, questions, voire mécontentement chez nombre de parents venus pour les enfants.
Nous étions 3 médecins. Chacun a du voir plus de 80 personnes, et comme c'était mercredi, une nombre incroyable de familles avec des enfants de tous âges, et des parents qui voulaient à tout prix le vaccin sans adjuvant alors que ce n’était plus possible. Mais aussi des malades de tous horizons, atteints de pathologies multiples et compliquées : dyalisés, cancers, greffés. Tous n’entraient pas dans les cases des tableaux d’indication. J'ai du téléphoner a l'oncologue de ma clinique pour poser une question, a un hémato pour une autre, et à un généraliste qui m'a insultée car je ne pouvais pas prescrire de vaccin non adjuvé pour une enfant, sans raison de le faire, car les stocks sont comptés. Pas mal de personnes se croient en consultation médicale et veulent que l’on voie tout, ordonnance, traitements, alors qu'on a seulement quelques minutes pour s'assurer de l'absence de contre indication, faire l'ordonnance de vaccin et les envoyer vers l'infirmière qui injecte.
Sans compter les innombrables questions politico-philosophiques sur le vaccin, pourquoi, comment et ou ça va nous mener tout ça ma brave dame….
On ne peut qu’admirer la passive patience de tous ces gens. Ils arrivaient déjà à 13 h pour une ouverture à 14. Certains ont attendu 4 heures. Avec les mioches. Certaines mamans, c’est un comble, n’ont pu faire vacciner que leurs enfants car elles n’avaient pas reçu le sésame de la sécu. Rares ont été celles qui ont eu le courage de se rebeller, et d’ailleurs d’obtenir de ce fait la permission de se faire vacciner ce jour.
De cette irréelle journée, je sors avec une question :
- Qu’est ce qui explique que tant de gens soient ainsi capable de faire une passive queue leu leu pour se plier à l’inconséquence de l’administration ?
Et une constatation :
- Quel déprimant spectacle que la santé publique à la française .